Des sénateurs américains ont déposé un projet de loi pour réglementer les expériences utilisateurs trompeuses en ligne (DETOUR, ou « The Deceptive Experiences to Online Users Reduction Act », ce qu’on surnomme les Dark Patterns. Des méthodes qui ne sont pas tout à fait (pas encore!) frauduleuses, mais qui sont régulièrement utilisées par les grandes et petites plateforme pour vous confondre sur le web – rendre les choses plus compliquées qu’elles devraient être, ou même, encourager la dépendance… Tout ça pour profiter un peu plus de vous!
Le projet de loi, s’il se concrétise, rendrait illégales les techniques pour mélanger les utilisateurs quand vient le moment de faire un choix ou de partager des informations personnelles.
Ce billet est un complément de ma chronique à l’émission Les éclaireurs du 8 mai 2019. Vous pouvez l’écouter en suivant ce lien.
La loi viserait les grandes entreprises, devenues trop importantes (et même, dans certains cas, essentielles!) pour que le consommateur moyen puisse cesser de les utiliser. On veut s’assurer qu’elles ont notre meilleur intérêt à cœur.
Quelques exemples de dark pattern
- Personnellement, quand je pense à « technique trompeuse », je pense toujours à l’installation de logiciel qui demande de cliquer plusieurs fois sur « Oui » pour confirmer l’installation. On clique par habitude, sans se rendre compte qu’un des clics était pour installer des logiciels douteux ou une barre d’outil publicitaires dans son navigateur.
- Vous abonner automatiquement à des listes d’envoi publicitaire quand vous faites un achat en ligne, parce que la case « oui » est cochée par défaut.
- Le désabonnement à un service ou à une liste d’envoi qui demande de remplir un questionnaire, de cocher plusieurs cases, ou de taper de nouveau son adresse de courriel complète, de passer au travers d’un labyrinthe interminable. On donne l’exemple de fermer son compte Amazon! C’est la technique dite du « motel à coquerelle » – facile d’y entrer, difficile de s’en sortir.
- Dans un jeu gratuit, on vous habitue à cliquer sur un bouton vert pour aller à l’étape suivante… Mais un bouton vert vous emmène à acheter quelque chose pour continuer.
- Ça peut être simplement toutes les techniques pour augmenter l’urgence d’acheter – une fenêtre qui vous indique qu’il ne reste que 2 billets sur un site de voyage, un compte à rebours, un message comme quoi quelqu’un d’autre vient d’acheter…
Le site Darkpatterns.org donne une liste de diverses techniques utilisées pour vous confondre:
- Confirmshaming (confirmatihonte?), quand on vous fait sentir vraiment coupable de quitter un service – quand on vous rappelle de qui vous n’aurez plus de nouvelles quand on quitte un réseau social, par exemple
- Coûts cachés: quand on découvre à la toute fin d’un processus d’achat en ligne que des frais supplémentaires surprises se sont ajoutés
- Le leurre: on vous donne l’impression de faire quelque chose, alors que vous faites quelque chose d’autres (mettre en veille temporairement un service au lieu de l’annuler)
- Les pubs déguisées: quand ce qui ressemble à du contenu ou à un élément de navigation est en fait une publicité…
- Les messages aux amis: on demande la permission d’utiliser vos coordonnées de courriel ou de réseaux sociaux pour envoyer des message à vos amis… Qui semblera provenir de vous
- Se faire « Zuckerer » – en l’honneure de Mark Zuckerberg de Facebook – être incité à donner plus d’infos personnelles qu’on désire (à des partenaires commerciaux) sans s’en rendre compte…
Ça peut aussi être des messages écrits en trop petits caractères, des informations bien cachées… Chaque page qui charge peuvent rapporter des revenus publicitaires!
Les titre trompeurs « clickbaits »: titiller votre curiosité rapporte
Je me permets de glisser un mot sur les titre vagues pour nous faire cliquer, une autre technique pour vous inciter à cliquer sur des liens douteux. Des titres comme « Cette vedette bien connue s’est retrouvée dans l’embarras! », « Un aliment que vous avez dans votre frigo peut guérir le cancer », « Est-ce qu’il y a une séquence après le générique dans le dernier Avengers? »… Vous devez cliquer pour avoir la réponse, qui est souvent décevante. Mais on vous a eu, votre clic compte pour générer des revenus publicitaires!
Pourtant, certains sites populaires (dont des sites québécois) ne font pratiquement que ça… Il y a sur Facebook le groupe « Stop Clickbait », qui répond – souvent en un mot – aux titres accrocheurs des articles, vous sauvant un clic et privant des sites qui se moquent de vous de revenus publicitaires.
Trucs pour éviter les dark patterns
En attendant qu’ils soient mieux réglementés, quelques trucs pour éviter de se faire avoir par des techniques malicieuses:
- Méfiez-vous des fenêtres surgissantes (pop-up) dont le X pour la fermer est caché. Utiliser la touche Échapper (Escape) permet habituellement d’y arriver. Ça vaut la peine de la repérer sur votre clavier.
- Survolez un lien de votre curseur avec votre souris avant de cliquer pour avoir une idée du site où un lien vous mènera.
- Cliquez lentement, pour éviter les liens et les menus qui apparaissent parfois par-dessus l’endroit où vous voulez vraiment cliquer.
- Soyez en alerte totale si vous vous aventurez sur des sites de contenu piraté, illégal ou porno… Les créateurs de site sont alors beaucoup moins scrupuleux: un clic au mauvais endroit peut avoir des conséquences beaucoup plus graves (virus, rançongiciels, etc).
- Mais surtout, chacun de vos clics rapporte. Pensez-y avant de visiter, encourager, ou partager du contenu de sites qui utilisent des techniques douteuses. Ces sites n’ont pas votre meilleur intérêt à cœur, mais le leur!
P.
Liens supplémentaires sur les dark patterns
- Senators just unveiled a bill to stop deceptive design and dark patterns
- Darkpatterns.org
- Le groupe Facebook Stop Clickbait
- Mieux comprendre et éviter les Dark Patterns (en français)
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